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Pour le Pr René Yiou : "Si les résultats de cette étude sont confirmés par d’autres essais cliniques contrôlés, les indications de la thérapie cellulaire pourraient s’élargir aux autres formes de troubles de l’érection moins sévères ou résultant de maladies générales comme le diabète ou autres maladies vasculaires. "
Les troubles de l’érection (impuissance sexuelle) restent une séquelle fréquente après l’ablation chirurgicale d’un cancer de la prostate (prostatectomie radicale). Ils sont susceptibles d’altérer sévèrement la qualité de vie et l’image de soi des hommes. Les troubles de l’érection sont la conséquence de lésions des vaisseaux et des nerfs du pénis qui sont normalement accolés aux faces latérales de la prostate avant d’atteindre les formations érectiles.
Un essai clinique pilote a été mené par l’Inserm pour réparer les lésions cellulaires péniennes causées par la prostatectomie radicale. Cette nouvelle approche thérapeutique a consisté à injecter dans le pénis des cellules souches prélevées dans la moelle osseuse des patients.
De nombreuses études ont montré que la moelle osseuse contient plusieurs types de cellules souches ayant la capacité de se transformer spontanément en cellules du même type que celles endommagées dans le pénis après prostatectomie radicale (essentiellement les cellules endothéliales, musculaires lisses, conjonctives). Elles peuvent également secréter des substances favorisant la réparation de vaisseaux sanguins et de nerfs endommagés.
Ce traitement n’ayant encore jamais été testé chez l’homme, il était nécessaire de faire un premier essai sur un petit nombre de patients pour tester la tolérance de plusieurs doses de cellules. Dans cette étude pilote, ont été inclus des patients présentant des troubles de l’érection sévères et jugés irréversibles après une prostatectomie radicale, c’est à dire que le traitement médical maximal (Injections de prostaglandine dans le pénis + Viagra aux doses maximales et l’utilisation d’un vaccum ou pompe à érection restait inefficace après une durée moyenne de deux ans. D’autre part, l’écho Doppler pénien montrait des altérations sévères des vaisseaux du pénis à l’origine des troubles de l’érection.
Méthodologie de l’essai
12 patients ont été inclus pour une durée totale de 6 mois. Quatre doses croissantes de cellules souches ont été testées et chaque patient participant à l’essai clinique n’a reçu qu’une seule injection. Les cellules souches ont été prélevées dans la moelle osseuse de la hanche et préparées par l’Etablissement Français du Sang (Dr. Hélène Rouard).
Les effets de la greffe cellulaire ont été évalués par des auto-questionnaires spécifiques évaluant par scores les principaux domaines de la vie sexuelle : satisfaction des rapports sexuels, fonctions érectile et orgasmique, désir sexuel, et la rigidité du pénis lors des rapports. Une étude des vaisseaux du pénis a été effectuée par écho Doppler avant et après la greffe de cellules. Les chercheurs ont par ailleurs évalué les modifications de la taille du pénis après greffe, puisque la rétraction pénienne est une séquelle fréquente de la prostatectomie radicale.
La tolérance au traitement été excellente et le principal effet secondaire rapporté était une douleur passagère au niveau du site de prélèvement de la moelle osseuse (région fessière). Six mois après la greffe cellulaire, les chercheurs ont noté une amélioration significative des principaux scores sexuels , notamment un gain moyen du score évaluant la fonction érectile de +10 points (17,4/30 à 6 mois versus 7,3/30 avant la greffe) sur une échelle allant de 0 à 30 (30 correspondant à la meilleure fonction érectile possible).
Les autres scores significativement améliorés concernaient la satisfaction globale des rapports sexuels : 6,8/10 à 6 mois versus 3,9/10 avant la greffe (10 étant le score le plus favorable) ; la qualité de l’orgasme : 6,3/10 à 6 mois versus 3,5/10 avant la greffe ; la rigidité du pénis lors des rapports : 2,6/4 à 6 mois versus 1,3/4 avant la greffe (4 indiquant une rigidité maximale).
Au moins deux patients ont décrit une réapparition d’érections normales comme avant la prostatectomie radicale sans prise de médicament.
Une augmentation moyenne de 1 cm de la longueur du pénis a été constatée. Les bénéfices cliniques ont été plus marqués pour les doses élevées et étaient associés à une normalisation des mesures vasculaires artérielles péniennes par écho Doppler.
L’amélioration des scores sexuels s’est maintenue 1 an après la greffe même si certains patients continuaient à utiliser un traitement lors des rapports. Face à ces bons résultats, les chercheurs souhaitent toutefois rappeler que : « le faible nombre de patients inclus dans l’étude et l’absence de groupe contrôle qui aurait reçu une injection « placebo » incitent à la prudence quant à la démonstration avec certitude de l’efficacité de cette nouvelle stratégie thérapeutique« .
Cependant, il est important de rappeler que les patients traités présentaient tous des troubles de l’érection sévères ne répondant pas au traitement médical maximal et associés à des altérations importantes de la vascularisation pénienne. La probabilité d’amélioration spontanée des érections avait été jugée comme quasi-nulle avec ces critères. L’amélioration des scores sexuels associée à une normalisation des mesures écho Doppler péniennes plaide en faveur d’un effet bénéfique de la greffe de cellules souches à moyen terme. Cette stratégie thérapeutique pourrait constituer la première approche à visée curatrice des troubles de l’érection.
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